L’Union européenne peut-elle se passer demain de la Turquie ? Et la Turquie de l’Europe ?
L’heure des choix est arrivée alors que s’ouvre le 3 octobre prochain les négociations sur l’adhésion ou non de la Turquie à l’Union européenne, même si cette entrée est encore une perspective lointaine. « C’est un enjeu historique », estime dans un éditorial le « Corriere della Sera ». Le grand quotidien conservateur italien prend nettement parti en faveur de ce pays de 70 millions d’habitants actuellement et qui sera dans dix ans plus peuplé que l’Allemagne. Le journal rappelle tous les efforts faits par Ankara pour obtenir le feu vert à l’ouverture de ces tractations, mais aussi les forces contraires en Turquie qui font tout pour résister à une adhésion en agitant aussi bien les policiers que les magistrats. Sans oublier l’influence de ces forces en dehors même de leurs frontières. « Pour saboter les discussions, révèle ainsi l’éditorialiste Gianni Riotta, elles alimentent sournoisement la propagande anti-turque en Allemagne (Angela Merkel déteste l’idée d’Ankara dans l’Union européenne) et en France. » Et cela au moment même où « la mort prématurée de la Constitution européenne sous les fourches des électeurs français et hollandais » a laissé le continent sans frontière idéale, poussant nombre de dirigeants européens « à barricader l’Union européenne derrière un double mur de droits de douane et d’exclusion ». « C’est une erreur ! », écrit le « Corriere ». L’Europe, poursuit le quotidien, a bien entendu le droit « de contrôler avec sévérité les progrès de la démocratie en Turquie, mais si elle réussissait à accroître sa propre présence sur le Bosphore elle donnerait au monde une démonstration de force, d’idéalisme, de sa capacité à projeter ses propres traditions dans l’avenir, tout en confirmant sa propre identité historique face à de nouveaux défis (...) ». « Ce serait une Europe superpuissance, politique, économique et morale », conclut le « Corriere ».
27/09/05