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La victoire de la démocratie et du Droit

jeudi 4 septembre 2008, par Ekrem Dumanli, Nuri Arslan

Retour sur la décision judiciaire qui devait marquer l’été politique en Turquie...

Hier, la cour constitutionnelle a signé une décision historique. La non-interdiction de l’AKP. Cependant le financement public de ce parti sera coupé. Une décision équilibrée. Ce jugement est une victoire pour la démocratie et aussi pour le droit.

Des leçons doivent en être tirées : à l’avenir chacun devrait être plus attentif sur le chemin à parcourir pour la démocratie car l’interdiction de l’AKP aurait représenté un coup d’état judiciaire ! La cour constitutionnelle par cette décision a évité la « honte » à la Turquie.

Après tout, aucun coup d’état militaire ou coup d’état constitutionnel ne saurait être légitimé dans une Turquie moderne. Malgré cela, certains ont du mal à l’accepter et continuent leurs provocations en parlant de « bon coup d’état ».

Dans l’émission « Tarafsiz bölge » de Ahmet Hakan, Oral Çalislar [Journaliste et chroniqueur à Radikal, homme de gauche et démocrate, Ndlr] est revenu sur une anecdote. L’éditorialiste Ilhan Selçuk du quotidien Cumhuriyet, 10 jours avant d’être mis en examen lui avait fait part de la distinction qu’il opérait entre « bon coup d’Etat, mauvais coup d’Etat ». Ali Sirmen, journaliste à Cumhuriyet rejetait les affirmations de Çalislar : ce-dernier lui proposa alors de vérifier par lui-même auprès de Selçuk. Sirmen estima qu’il n’en avait pas besoin.

« Bon coup d’état, mauvais coup d’état » et puis quoi encore ! Qui peut bien profiter d’un « bon coup d’état » ? Quelles sont les raisons qui poussent des journalistes, écrivains, intellectuels ou entrepreneurs à esquisser l’idée qu’il n’y a pas de coup d’état dans la mesure où il n’est pas dirigé contre eux ? Peut-être faut-il voir les choses de cette façon. Par exemple, le coup d’Etat de 60 : qui s’en est mordu les doigts et qui a bien pu en profiter ? Les anciens nous prévenaient déjà que « les gens n’ont que ce qu’il méritent ».
L’histoire a montré que les tortionnaires seront tôt ou tard poussés vers la sortie, marqués du sceau de la honte. Quant aux personnes qui courent vers un « bon coup d’état », chacun sait comment le coup d’état du 28 février 1997 a institué un système mafieux et a liquidé prés de 80 milliards de dollars d’actifs de l’Etat.

Il y a également une vision plus idéologique sur le bien et le mal. Afin de protéger le système/régime, certains groupes relativisent ces notions. Lors des investigations liées à l’affaire Ergenekon, des écoutes téléphoniques de Ilhan Selçuk nous ont montré que ce ne sont pas des histoires à dormir debout. « Si dans le même temps une crise économique survenait et mettait à mal la paix civile en Turquie alors on pourrait espérer beaucoup de choses » dixit Selçuk. Sa raison : « on ne peut pas faire passer les choses par la voie normale » c’est-à-dire par la voie démocratique. Donc un bon coup d’état a besoin d’une crise économique et d’un poil d’anarchie... et les médias d’en rajouter « Sir, Yes Sir ! » quand les mêmes en critiquent d’autres d’être trop obéissants à l’égard du pouvoir.

Les personnes importent peu en définitive. Mon sujet n’est pas Ilhan Selçuk mais leur position et leur attitude envers la démocratie....contrairement à ceux qui la voient comme un terrain de jeu, seuls ceux qui aiment ce pays ont pu voir les dégâts commis. […]
Les nombreux documents de l’organisation criminelle Ergenekon teintée de nationalisme et leurs tentatives de « bon coup d’état » ont consisté à maintenir une pression sur les tribunaux. L’homme qui a passé sa vie en tant que recteur de l’université d’Istanbul [Kemal Alemdaroglu, ndlr] parle toujours et encore de « bon coup d’état ».
« Meme si le sang coule, on a besoin d’un coup d’état mais il faut d’abord lancer la procédure d’interdiction » voila pour les mots de Alemdaroglu et pour les médias qui pensent toujours que Ergenekon est un club de lecture. Non, non, je vous assure leur seule préoccupation est celui d’un « bon coup d’état ».

Donc ça ne se limite pas aux dires de Ilhan Selçuk, mais à beaucoup d’autres dans leurs habits de juristes comme Alemdaroglu qui passent en boucle sur les écrans.
[…]

Il n’existe pas de bienfaits ou de maladresses dans un coup d’état. Ni de différence entre coup d’état militaire ou coup d’état judiciaire. Si ce n’est pire. Car il mettra à mal la notion de justice et de droit. Vouloir politiser le pouvoir judiciaire est une erreur. Chaque coup d’état est et restera hors du droit. C’est un crime contre le citoyen, un crime contre l’humanité de pousser l’Armée au coup d’état et mettre à mal la relation Etat-Citoyen.

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Sources

Source : Zaman on Line, 31 juillet 2008

- Traduction pour TE : Nuri Arslan

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