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Nous, Hollande, l’Europe et la Turquie

dimanche 20 mai 2012, par Reynald Beaufort

La France a élu un nouveau président, je leur souhaite à tous les deux du courage et de la ténacité, ils en auront besoin tellement le contexte économique est, et restera, difficile.

Rares sont ceux qui nous écrit pour protester contre le choix de mon éditorial précédent, d’appeler à voter pour François Hollande. Mais je tiens quand même à expliquer cette prise de parti inhabituelle de ma part en tant que fondateur et vice président de Turquie Européenne.

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Sarkozy et la Turquie
Dessin de Plantu

Tout d’abord, je n’ai pas, malgré mes convictions de militant de gauche profondes et assumées, appelé à voter pour qui que ce soit au premier tour, parce que cette association rassemble des sensibilités très différentes autour d’une idée : l’idée simple que la Turquie n’a aucune raison d’être exclue a priori de l’Union Européenne. L’Union Européenne a accepté sa candidature à plusieurs reprises et elle est entrée dans le processus d’adhésion en 2005. Tous dans cette association ont conscience que le chemin est encore long et semé d’embûches.

Mais nous sommes sûrs aussi que le fait d’avoir ostracisé ce pays comme l’ont fait Nicolas Sarkozy, Angela Merkel et d’autres gouvernements Européens ont contribué à la démotivation des responsables et de la population turcs et voir même à l’instrumentalisation par l’AKP de ce rejet européen pour des fins de politique intérieure et servi de prétexte à la réorientation des relations internationales vers le Proche et Moyen Orient ainsi que l’Asie.

Nicolas Sarkozy n’a eu de cesse d’afficher son mépris pour la Turquie avec des déclarations tonitruantes voulant montrer que son altérité était évidente, telles que « à l’ école, j’ai appris que la Turquie était en Asie Mineure » , nombre d’autres déclarations tout au long de son mandat , une seule visite éclair humiliante et le très définitif « Mon choix est clair : la Turquie n’a pas vocation à entrer dans l’Union Européenne » de la profession de foi du deuxième tour.

Comment cette association pourrait-elle ne pas se positionner contre un candidat qui fait du rejet de la Turquie un argument essentiel de sa campagne et qui a tout fait durant son mandat pour ralentir le processus de négociation ?

Mais ma motivation ne s’arrête pas à cette attitude envers la Turquie. Il n’est pas une ONG qui n’ait eu à souffrir de la politique délibérée de démantèlement du tissu associatif, y compris celui qui œuvrait pour l’intégration des turcs de France, beaucoup d’associations amies ont du réduire leurs ambitions quand elle n’ont pas tout simplement fermé leurs portes, laissant le champ libre aux seules organisations cultuelles se réclamant de l’Islam. Résultat intéressant pour un ex-président qui ne cessait de stigmatiser la gauche pour une supposée politique favorisant la « communautarisation » de la société. Je suis persuadé que la première cause du repli communautaire est l’exclusion du périmètre de la république par la création de citoyenneté de différents niveaux assise sur l’origine ethnique. Quand on crée un Ministère de l’Identité Nationale, ce n’est pas un acte d’intégration, c’est afficher une volonté manifeste de rejet par création d’une identité exclusive et quasiment immuable.

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Sarkozy à Hollande : Bonne chance, mon pote !
Dessin de Plantu

Cette association s’appuie en partie sur un réseau universitaire international, nous sommes enthousiasmés par les programmes européens d’échanges d’étudiants (Erasmus, Socrates et aujourd’hui Socrates II et les nouveaux Consortia, Lingua et Tempus) Ces réseaux et politiques favorisant l’amitié entres les peuples sont aujourd’hui menacés par des circulaires comme celle de M. Guéant. Nombre de sympathisants de Turquie Européenne se sont engagés au côté des étudiants étrangers, d’autres contre les graves atteintes portées à la recherche et au système éducatif , d’autres encore contre le harcèlement des étrangers, les reconduites à la frontière, les arrestations d’enfants dans les écoles. Il est indiscutable que M. Sarkozy et son parti se sont engagés sur les voies hasardeuses du populisme et de la complaisance active envers des idées lesquelles, il n’y pas si longtemps, étaient objet de honte pour qui les proféraient. La conséquence la plus grave de de glissement à droite est la banalisation d’idées contraires aux valeurs de ce pays, des idées que la tragédie de la première moitié du vingtième siècle avait provisoirement enfouis comme déchets toxiques de l’histoire.

Oui j’ai pris parti engageant ainsi l’association, mais je l’a fait car le président candidat a rompu le pacte républicain. Les idées qui nous sont intolérables en Turquie n’ont aucune raison de ne pas l’être ici, en France et en Europe. Il ne s’agit pas de s’inféoder à tel ou tel parti politique, nous sommes ouverts à tous les humanismes et nous resterons vigilants et critiques vis à vis du nouveau gouvernement, mais une organisation qui n’a pas une ligne claire est un récipient vide.

Nous travaillons à écrire une nouvelle charte constitutive pour Turquie Européenne à lesquelles les candidats à l’adhésion à l’association, mais aussi nos rédacteurs et sympathisants pourrons se référer. Dans ce document figureront des engagements humanistes et l’acceptation des règles universelles des droits humains et aussi, évidemment, ceux d’œuvrer à rapprocher la Turquie de l’Europe par la mise à disposition d’informations et l’analyse critique et de soutenir tous eux qui en France, en Turquie et en Europe travaillent à cette convergence.

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