Des dizaines de milliers de Kurdes de Turquie se sont réunis lundi dans le sud-est anatolien pour célébrer le Newroz, leur fête traditionnelle du Nouvel An, qui a été dans le passé l’occasion de tensions et d’affrontements sanglants avec les forces de sécurité turques.
Des dirigeants kurdes qui participaient aux célébrations à Diyarbakir, la principale ville de la région à majorité kurde, ont enjoint Ankara d’étendre les droits de leur minorité et de mettre fin à un conflit qui a fait quelque 36.500 morts.
« Nous n’attendons de solution ni de l’Union européenne, ni des Etats-Unis, mais de ceux qui gouvernent la Turquie », a déclaré devant la foule Tuncer Bakirhan, le président du Parti démocratique du peuple (Dehap, pro-kurde).
« Si vous vous décidez, le peuple kurde est prêt avec ses projets et les problèmes peuvent être résolus en trois mois », a poursuivi le politicien, cité par l’agence de presse Anatolie.
Ankara, longtemps pressée par la communauté internationale d’étendre les droits des Kurdes, a récemment accordé à cette minorité forte de plus de 10 millions de personnes de nouvelles libertés culturelles dans le cadre de réformes entreprises pour favoriser l’adhésion de la Turquie à l’UE.
Les Kurdes demandent cependant que ces réformes soient mises en œuvre sur le terrain.
Ils réclament notamment une amnistie collective pour les rebelles ayant combattu les forces de sécurité turques entre 1984 et 1999 dans les rangs de l’organisation séparatiste du Parti des travailleurs du Kurdistanrebaptisé Kongra-Gel).
La célébration du Newroz est devenue pour les Kurdes l’occasion de revendiquer leurs droits et d’afficher leur soutien au PKK.
Un important dispositif policier -fort de 4.000 agents selon la chaîne de télévision CNN-Turk- a été déployé lundi à Diyarbakir pour assurer le bon déroulement des célébrations, au cours desquelles hommes et femmes ont dansé et chanté autour de feux sur la place des expositions de la ville.
Certains participants portaient des drapeaux du PKK et scandaient des slogans favorables au chef de l’organisation clandestine, Abdullah Ocalan, convaincu de trahison et purgeant une peine de réclusion à vie dans l’île-prison d’Imrali (nord-ouest).
Dans un communiqué diffusé par l’agence de presse pro-PKK MHA, M. Ocalan a plaidé depuis sa cellule pour l’instauration d’un système confédéral réunissant toutes les communautés kurdes sans remettre en cause les frontières des Etats existants, renonçant de fait à un Etat kurde indépendant.
Trente-six personnes ont été arrêtées la veille dans la ville de Mersin (sud) après qu’un groupe de participants aux fêtes du Newroz eut tenté de brûler un drapeau turc, causant des tensions entre la foule et les forces de sécurité, a rapporté la chaîne de télévision NTV.
Les autorités turques ont interdit pendant de nombreuses années les célébrations du Nouvel An kurde, craignant que celles-ci ne dégénèrent en affrontements, ce qui avait été notamment le cas en 1992, quand quelque 50 personnes avaient été tuées par les forces de sécurité lors des fêtes. Des interventions policières en 2002 ont aussi fait deux morts et des dizaines de blessés.
Le Newroz est également célébré en Iran, dnas le Caucase et en Asie Centrale.