« La Commission dira clairement que, tant qu’un élément aussi central que la réforme du code pénal n’est pas adopté, les négociations d’adhésion ne peuvent pas démarrer » : Jean-Christophe Filori, le porte-parole du commissaire à l’élargissement, Günter Verheugen, s’est voulu des plus clairs lundi 20 septembre à Bruxelles. Le report de l’examen du projet de loi sur la réforme du code pénal turc suscite une crise de confiance inattendue avec Ankara à deux semaines de la publication, attendue le 6 octobre, de la recommandation de la commission sur l’opportunité d’ouvrir les négociations d’adhésion avec la Turquie.
Le gouvernement de Recep Tayyip Erdogan n’est toujours pas en mesure de rassurer les dirigeants européens sur ses intentions : son porte-parole et ministre de la justice, Cemil Cicek, a affirmé lundi devant la presse qu’« il n’y a rien de nouveau à dire là-dessus ». A l’issue d’une réunion du cabinet, il a expliqué que les modifications du code pénal se placeraient dans le cadre d’autres réformes prévues dans le domaine de la justice. « Espérons que nous les aurons accomplies vers la fin de cette année », a-t-il ajouté.
L’ajournement du vote du projet de loi préparé par le gouvernement turc semble aujourd’hui de nature à gripper un processus qui semblait bien engagé ces dernières semaines. Sous la pression européenne, le gouvernement turc a tenté de supprimer l’article le plus controversé du code pénal, qui prévoyait de rendre l’adultère passible d’emprisonnement.
M. ERDOGAN À BRUXELLES JEUDI
Mais M. Erdogan a ensuite dû faire machine arrière, face aux réactions de l’aile conservatrice de sa formation - le Parti de la justice et du développement (AKP), issu de la mouvance islamiste -, en reportant l’adoption de l’ensemble du projet de loi. « Ca tombe très mal : le débat au sein de l’Union était présenté comme acquis, il devient plus complexe, même si la perspective d’une ouverture des négociations demeure la plus probable », indique un diplomate.
M. Erdogan doit mettre à profit une visite prévue de longue date dans la capitale européenne, jeudi 23 septembre, pour tenter d’apaiser les tensions. Contrairement au programme initial, qui ne prévoyait qu’une visite au Parlement européen, il devrait rencontrer M. Verheugen. Les diplomates turcs laissent entendre que le Parlement pourrait être de nouveau saisi du texte début octobre, à l’ouverture de la session d’automne, mais ils ne peuvent donner aucune garantie sur le calendrier et l’issue des débats.
M. Verheugen était jusque-là partisan d’une ouverture « sans délai » des pourparlers. Il plaidait ces dernières semaines pour une recommandation « claire et ferme, (...) sans conditions », afin de permettre aux Etats membres de trancher dès le 17 décembre. Lors d’un récent voyage en Turquie, le commissaire allemand avait souligné « l’ampleur des changements en cours » sous l’impulsion du gouvernement de M. Erdogan.
Seules les difficultés de mise en �uvre des réformes semblaient vraiment le préoccuper. Mais cette appréciation plutôt favorable se fondait sur l’adoption du code pénal, laquelle semblait alors imminente.