La décision de la France d’organiser un référendum sur l’adhésion de la Turquie à l’Union européenne a été vivement critiquée samedi à l’Université de Galatasaray lors de la venue de la délégation française conduite par le président de l’Assemblée nationale Jean-Louis Debré.
Au dernier jour de la visite en Turquie de M. Debré et des présidents des groupes, Bernard Accoyer (UMP), Jean-Marc Ayrault (PS), Alain Bocquet (PCF) et Hervé Morin (UDF), les responsables de cette université francophone n’ont pas mâché leurs mots pour dénoncer cette initiative contenue dans le projet de révision constitutionnelle adopté cette semaine par l’Assemblée nationale.
Le responsable du département économique, Seyfetin Gürsel a relevé que le projet de révision comprenait l’obligation d’un référendum pour les nouvelles adhésions, mais pas celles de la Roumanie, la Bulgarie et la Croatie, en raison de l’état d’avancement des négociations. Cette disposition devrait s’appliquer à la Turquie le moment venu. « On peut comprendre pour la Bulgarie et la Roumanie mais pour la Croatie, c’est incroyable, puisque pour ce pays les négociations n’ont pas débuté, alors que la Turquie est plus avancée » dans les réformes, a-t-il critiqué.
« Tout d’un coup les Turcs se sont sentis lâchés par la France », a-t-il affirmé, alors que la France avait « toujours appuyé » la Turquie et son « européanité ».
Rappelant que les chefs de l’Etat français, à l’exception de Valéry Giscard d’Estaing, s’étaient inscrits dans cette démarche, il s’est étonné, auprès de la presse, de l’attitude du président de l’UMP Nicolas Sarkozy. « Peut-être que l’UMP n’est plus gaulliste », a-t-il déclaré, en notant que Charles de Gaulle avait dit de la Turquie et de la France, c’est « notre continent ».
Les responsables de cette université se sont dit « déçus et choqués » des propos de M. Sarkozy selon lesquels « si la Turquie était en Europe, ça se saurait ».
A propos du référendum, M. Ayrault a rappelé que les socialistes français y étaient comme eux opposés et avaient voté contre cette disposition. Pour sa part, M. Debré a défendu cette consultation, en faisant valoir qu’elle était « normale » s’agissant d’un pays de 71 millions d’habitants. Il a rappelé que l’entrée de la Grande-Bretagne avait donné lieu à un référendum.
Comme le patronat turc, les universitaires ont critiqué l’idée d’un partenariat privilégié.
MM. Debré et Ayrault se sont employés à expliquer la diversité des positions en France et ont assuré que les membres de la délégation n’avaient « aucun a priori, ni préjugé ». « N’entendez pas uniquement les opposants », a lancé M. Debré, en soulignant que le président Jacques Chirac s’était « clairement » déclaré en faveur de l’adhésion d’Ankara.