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Voter oui pour mieux dire non

mercredi 11 mai 2005

Le Figaro - 11/05/2005 -
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Le président et les membres du groupe de travail « le Oui pour le Non », les députés : Richard Mallie, Marc Bernier, Gabriel Biancheri, Jean-Marie Binetruy, Ghislain Bray, Roland Chassain, Charles Cova, Bernard Depierre, Jean-Jacques Descamps, Georges Fenech, Bruno Gilles, Maurice Giro, Claude Goasguen, François Grosdidier, Dominique Le Mener, Dominique Paille, Christian Philip, Michel Raison, Eric Raoult, Jacques Remiller, François Rochebloine, André Santini, Guy Teissier, Léon Vachet, Philippe Vitel.

La plupart des signataires de cet article sont par ailleurs connus pour être totalement acquis au lobby arménien ou avoir manifesté une aversion patente pour l’Islam. Il est d’ailleurs intéressant de noter que simultanément trois organisations arméniennes appellent à une manifestation pour demander que la date de début des négociations soit répoussée !. Le sachant, on peut raisonnablement conclure que l’objectif de cet article est tout autant de stigmatiser la Turquie que de se prononcer en faveur du vote positif au réferendum du 29 mai

Le 17 décembre 2004, les chefs d’Etat de l’Union européenne ont décidé de l’ouverture des négociations d’adhésion de la Turquie à l’Union européenne. Bien que ce processus de négociation soit long puisqu’une période minimale de dix ans est évoquée et que son aboutissement n’en soit pas garanti à l’avance, nous sommes nombreux en France et en Europe à éprouver de l’exaspération à l’idée même de l’ouverture de ces négociations - Nous y voilà ! Voir plus haut ! (note de Turquie Européenne). Notre réticence est d’autant plus forte que le gouvernement turc rejette toute autre possibilité que celle d’une adhésion pleine et entière à l’Union européenne et que le premier ministre turc, M. Erdogan, n’a pas hésité à se répandre en menaces et exigences sur les plateaux de télévision à la veille du sommet des chefs d’Etats européens. Un bel exemple de négociation.

Rien de bien extraordinaire, la France elle même a déjà usé aussi de menaces et manifesté des exigences et cela même très récemment, il s’agit là de pratiques normales courantes dans des négociations de cette importance. En réalité, il est tout à fait insupportable aux auteurs de cet appel que la Turquie puisse se comporter en égal avec les grands pays européens, la suite ne fera que le confirmer.

L’Union européenne a aujourd’hui un projet politique incompatible avec l’adhésion de la Turquie. La Constitution proposée au référendum fixe des valeurs communes à l’Union européenne et affirme l’existence d’une citoyenneté européenne : la charte des droits fondamentaux et celle de l’environnement sont officiellement inscrites pour la première fois dans un traité constitutionnel et prennent donc force juridique. Elle fixe les droits des citoyens européens dans les domaines civil, social, politique et environnemental. Comment pourrions-nous alors intégrer dans notre projet politique européen un Etat turc dont le premier ministre actuel a déclaré : « Les minarets sont nos baïonnettes, les coupoles nos casques, les mosquées nos casernes et les croyants nos soldats » ?

Cet argument est totalement fallacieux : Il est pratiquement sûr qu’au moment où se posera la question de l’adhésion de la Turquie, M. Erdogan et son gouvernement ne seront plus en place et que la Turquie aura considérablement changé.

La Constitution définit également un projet politique. Elle positionne l’Europe sur la scène internationale comme une puissance de paix et d’équilibre, avec une politique extérieure, une sécurité et une défense communes. Intégrer la Turquie créerait un choc budgétaire qui mettrait en péril cette nouvelle Europe : selon une étude de la Commission, le coût de l’intégration turque aujourd’hui équivaudrait au quart du budget annuel de l’Union (120 milliards d’euros pour 2004). L’entrée de la Turquie, dont la richesse par habitant est quatre fois plus faible que celle de l’Union élargie, ferait perdre « leurs droits à subsides » à une douzaine de régions des dix nouveaux pays, devenues statistiquement « trop riches ». C’est pourquoi il nous paraît prévisible que, une fois unis autour de la Constitution, de nombreux Etats ne verront certainement pas d’un bon oeil l’adhésion « budgétivore » de la Turquie.

Nouvel argument contestable et contesté : la Turquie est en plein décollage économique. Il n’est pas impossible qu’à long terme, son adhésion ne rapporte pas plus à l’Union qu’elle ne lui coûte. Or, est-il besoin de rappeler que cette adhésion est prévue au plus tôt pour 2014.(note de Turquie Européenne)

Nous pensons que l’on n’a pas mesuré à quel point la Constitution pouvait constituer le meilleur des remparts contre l’hypothèse de l’adhésion de la Turquie à l’Union européenne. De plus, la révision de la Constitution française va rendre obligatoire l’organisation d’un référendum pour tout élargissement de l’Union européenne à des Etats pour lesquels l’ouverture des négociations d’adhésion aura été décidée après le 1er juillet 2004. Donc, les Français auront le dernier mot sur la Turquie : si une majorité de Français ne le souhaite pas, la Turquie n’adhérera pas à l’Union européenne, même s’il n’y a que la France pour refuser cette adhésion (article 58 du projet de Constitution européenne).

Ou comment essayer de récupérer les voix turcophobes est islamophobes pour le oui à la constitution ! Comment ne pas voir là le summum de la démagogie ? Plutôt que d’argumenter contre leurs a priori, on dit aux xénophobes, vous êtes dans le vrai et c’est pour ça qu’il faut voter avec nous ! Les suffrages n’ont décidémment pas d’odeur ! En réalité la Constitution ne change rien, absolument rien à la candidature turque, puisque que c’est seulement dans 10 ou 15 ans qu’il sera décidé de l’accepter ou non au sein de l’Union. C’est bien pour permettre à la Turquie de conformer sa législation avec les valeurs européennes et de pallier à ces carences en ce qui concerne les droits de l’homme que ce délai lui est donné.

Néanmoins, refuser l’adhésion de la Turquie à l’Union, ce n’est pas lui tourner le dos. Le rôle de la Turquie au XXIe siècle n’est-il pas, en conservant son identité, d’assumer sa place particulière liée à l’histoire de cet Etat d’Asie Mineure et qui est susceptible désormais d’assurer une interface de paix, d’échanges et de stabilité avec le Proche-Orient et l’Asie ? La Turquie peut devenir le pôle fédérateur des peuples turcophones de l’Asie, de ceux du Caucase et de ceux du Moyen-Orient. Là encore, le projet de Constitution européenne (l’article 57) nous apporte une solution en créant un statut spécial destiné aux pays qui jouxtent l’Europe, mais qui sont au-delà de ses frontières(!), tels que la Turquie : le statut de partenaire privilégié. De cette manière, nous affirmons des frontières géographiquement cohérentes pour l’Europe, tout en créant les conditions de la paix et du développement avec les pays qui sont au-delà.

Jusqu’à preuve du contraire, ce n’est pas ce que la Turquie souhaite, le statut particulier, elle l’a déjà depuis longtemps. C’est une très vieille méthode que de faire une proposition inacceptable à l’autre partie pour essayer de faire croire que le refus vient d’elle ! La Turquie supporte déjà , en fait, la plupart des contraintes liées au statut de membre sans pouvoir participer aux décisions qui la concerne. Aucun pays ne tolérerait ce statut de vassal qui devrait, en quelque sorte, rester à la table des domestiques !

Ainsi, rejeter le projet de Constitution, en votant non, nous priverait de nos meilleurs atouts pour refuser l’adhésion de la Turquie à l’Union. A contrario, en votant oui, nous nous dotons d’un projet politique incompatible avec l’adhésion de la Turquie. En plus des autres arguments mobilisés en faveur du vote de la Constitution, tels que le désir de se doter d’une Europe qui aura les moyens d’être une puissance politique, mais sera aussi plus protectrice et porteuse d’espoir, ou encore la volonté d’agir pour l’avenir et la jeunesse de notre pays, c’est bien notre hostilité à l’adhésion de la Turquie à l’Union européenne qui, la première, fait que, pour le référendum, notre réponse sera résolument oui.

Une nouvelle fois la Turquie est brandie en épouvantail. Mr De Villiers et le Pen n’en demandaient pas tant ! Qu’on utilise ainsi leurs arguments sans se boucher le nez, apporte de l’eau croupie à leur moulin xénophobe. Le fait que ce soit pour en arriver à la conclusion exactement inverse ne change rien à la teneur de ces arguments ! Les Turcs ne sont pas de leur monde ! Nous préférons penser que ce sont tous ces apprentis sorciers adeptes du « fixisme historique » batissant des murs autour de leur pré carré et instrumentalisant la candidature turque qui appartiennent à un monde révolu ! Nous continuons à défendre que la perspective de l’adhésion est un extraordinaire moteur de réforme en Turquie, fermer la porte maintenant serait enlever aux démocrates de Turquie leur principal argument pour justifier les changements. Or l’Europe pour laquelle nous nous battons est avant tout une Europe solidaire qui croit en ses valeurs et en leur vocation universelle.

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