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Turquie : Cem Uzan, passé du gotha turc aux fichiers d’Interpol

mardi 20 octobre 2009, par Guillaume Perrier

Istanbul Correspondance

Il semble loin, le temps où Cem Uzan fréquentait le prince Charles. Rattrapé par la justice de son pays, le flamboyant « tycoon » turc est aujourd’hui un homme en cavale sous le coup d’un mandat d’arrêt émis, samedi 17 octobre, par Interpol.

Cem Uzan, 49 ans, s’est volatilisé début octobre. Menacé d’arrestation, il avait fui son pays en yacht, peu de temps auparavant, en accostant sur un îlot grec. On l’a dit en Jordanie, mais il pourrait être en France. C’est là, en effet, qu’il a déposé une demande d’asile politique. Le sulfureux milliardaire et éphémère homme politique y a obtenu un permis de séjour provisoire de trois mois, en attendant que la France statue sur sa requête.

Au faîte de sa gloire, le clan Uzan contrôlait 220 sociétés en Turquie et une quarantaine d’autres à l’étranger, présentes dans la téléphonie, les banques, la construction, l’énergie, les médias, l’immobilier... Son ascension fulgurante en avait fait la quatrième fortune du pays. Mais la faillite frauduleuse, en 2001, de la banque Imar, dans laquelle 6 milliards de dollars ont été engloutis et blanchis grâce à de faux bons du Trésor, a conduit l’Etat à saisir la plupart des biens et des sociétés de la famille.

Puis en 2003, les Uzan père et fils, qui possédaient le deuxième opérateur de téléphonie mobile turc, Telsim, étaient condamnés, aux Etats-Unis, à rembourser près de 4,8 milliards de dollars escroqués aux géants de la téléphonie Nokia et Motorola. Cem Uzan a également pris trois ans de prison en Turquie pour avoir dérobé à Telsim 3,5 millions de cartes de téléphone prépayées retrouvées dans une trappe au fond de sa piscine. Et en 2004, il avait été arrêté pour avoir forcé, avec une vingtaine de gardes du corps puissamment armés, les portes du ranch familial saisi par la justice. Malgré ce CV chargé, son avocate, Saylan Ciggin, parle de « lynchage politique ».

Shows exubérants

La carrière politique de Cem Uzan fut pourtant un échec. Si, en 2002, il a tenté, sans succès, de se faire élire député, c’est surtout parce qu’il visait l’immunité liée à cette fonction. Pour ce faire, il avait même créé le Genç Partisi, (le Parti jeune), une formation nationaliste et populiste. Au cours de la campagne, menée en hélicoptère, il avait distribué cadeaux, nourritures et promesses, organisant des shows exubérants à travers une Turquie minée par la crise économique.

Cem Uzan menait alors grand train : yachts, voitures de sport, un Boeing 747 et des propriétés dans onze pays dont le dernier étage de la tour Donald Trump à New York, acquis pour 38 millions de dollars. Il versait des millions aux fondations caritatives de la famille royale britannique et s’était lié d’amitié avec le prince Charles.

Aujourd’hui, Cem a rejoint en cavale son père Kemal et son frère Hakan, soupçonnés, comme lui, d’avoir détourné plusieurs milliards de dollars.

Guillaume Perrier

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Sources

Source : Le Monde, le 19.10.09

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