Le génocide arménien avait débuté un 24 avril, son 95e anniversaire a été commémoré en 2010. Pour les historiens, ce fut la première extermination méthodique d’un peuple au XXe siècle. Ce massacre n’a pas attendu le roman de Franz Werfel, Les quarante jours du Musa Dagh (1933) pour se graver dans la conscience historique occidentale. Mais sa dimension, tant par la durée que le nombre des victimes, est largement méconnue d’un bon nombre d’Européens. Et elle est passée sous silence, notamment par un grand nombre de responsables politiques turcs.
Avant de commencer un film, tout réalisateur se demande quelle histoire il veut raconter et si elle en vaut la peine. L’histoire de ce génocide, nous voulons la raconter parce qu’elle se situe au début du XXe siècle et parce qu’il est surprenant qu’au XXIe siècle, une grande nation civilisée persiste majoritairement à contester une vérité historique. Or, aucun avenir n’est possible sans travail de mémoire.
Faire découvrir l’Histoire à un large public
Depuis longtemps déjà, il aurait fallu parler en ces termes du génocide arménien, l’un des crimes qui a fait le plus de victimes au XXe siècle. Le documentaire « Aghet » d’Eric Friedler apporte réparation en rendant accessible à un large public un récit circonstancié de ces événements.
Claude Lanzmann avait contribué à rendre publique l’extermination des juifs dans son documentaire de 1985, dont le titre, « Shoah », signifie « holocauste » en hébreu. Et le documentaire d’Eric Friedler a délibérément pour titre « Aghet », synonyme en arménien de la catastrophe qui s’est abattue en 1915 sur les Arméniens.
Un sujet fort, un documentaire qui l’est aussi
Le documentaire « Aghet » se propose, comme Franz Werfel avec son livre, « d’arracher au royaume des morts tous ces événements » en retraçant un pan de l’histoire du début du XXe siècle. « Aghet » devient synonyme d’un crime inconcevable qui, d’après les historiens, est le précurseur de l’holocauste et des nombreux génocides qui ont suivi.
Si le sujet traité est important, la force filmique d’Aghet ne l’est pas moins. Elle tient à la qualité des recherches journalistiques, à l’esthétique particulière qui naît de la manière dont sont présentés les témoins de l’époque, à l’interaction entre le passé et le présent qui met en lumière la portée, à notre époque, de cet événement historique.
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