Durant deux jours, Abdullah Gül effectuera une visite de travail, sur invitation du président Paul Biya.
Par Rédaction Bonaberi.com (Anne Mireille Nzouankeu)
Paul Biya accueillant le président Turc sur le tarmac de Nsimalen.
Sur invitation du président de la République du Cameroun Paul Biya, Abdullah-Gül, le président de Turquie effectue une visite de travail au Cameroun les 16 et 17 mars 2010. Prévue à 12h45, c’est à 13h10 que l’Airbus A340 ayant à son bord, Abdullah-Gül le président de Turquie, une délégation de 120 hommes d’affaires et un parterre de journalistes turcs atterrit à l’aéroport international de Yaoundé-Nsimalen.
Dès l’atterrissage de l’avion, le président Paul Biya attend son homologue turc au bas de la passerelle pour lui souhaiter la bienvenue. Il s’en suit l’exécution des hymnes nationaux des deux pays : « Ô Cameroun » et « La marche de l’indépendance ». Abdullah Gul trouve ensuite le temps de serrer la main de plusieurs de ses compatriotes venus l’accueillir. Une fois arrivé à l’hôtel Hilton dans lequel il loge, Abdullah Gül reçoit en audience le Premier ministre, Philémon Yang. Le tête-à-tête dure une trentaine de minutes. Il reçoit ensuite le président de l’Assemblée nationale, Djibril Cavaye Yéguié.
A 15h, le forum économique Cameroun –Turquie débute. Les 120 hommes d’affaires turcs évoluent dans des domaines aussi variés que le bâtiment, les matériaux de construction, la transformation agro-alimentaire, l’ingénierie, la machinerie, le textile, le prêt-à-porter , l’équipement médical, la technologie de l’information, la communication , les produits d’hygiène personnelle et de nettoyage ou encore la bijouterie. Du côté camerounais, on retrouve les hommes d’affaires réunis au sein de la Chambre de commerce des mines et de l’industrie du Cameroun (Ccima), du Mecam (Mouvement des entrepreneurs du Cameroun) et du groupement des femmes d’affaires du Cameroun (Gfac). « Aujourd’hui, le Cameroun est au carrefour de son développement. Nous devons créer de la croissance et la seule manière de le faire est d’avoir des partenaires qui nous aident à transformer nos produits. Je pense que la Turquie, à travers son cheminement, peut beaucoup apporter aux entreprises et aux entrepreneurs locaux, qui ont besoin de transformer leurs matières premières », explique par exemple M. Mboka, le président du Mecam.
Toutefois, le forum économique, plate forme d’échange entre hommes d’affaires des deux pays, s’est déroulé sous fond de dialogue de sourds. La communication a été difficile entre des turcs parlant leur langue et les camerounais parlant le français. Des élèves d’« Amity international school », un collège privé qui dispense les cours en anglais et dans lequel on enseigne le turc comme seconde langue, ont été appelés pour la traduction. Heureusement, les hommes d’affaires turcs ont pris la peine de traduire toutes les brochures de présentation de leurs entreprises en français.
Le reste du séjour turc au Cameroun prévoit demain 17 mars 2010, un petit-déjeuner d’affaires entre opérateurs économiques camerounais et turcs, la visite d’ « Amity international school », le collège d’un privé camerounais qui a la particularité d’être le seul établissement scolaire du Cameroun dans lequel on enseigne le turc. L’inauguration de la nouvelle chancellerie de l’ambassade de Turquie sera la dernière étape avant le départ du Cameroun de la délégation turque.
Avant le Cameroun, la délégation turque était en République Démocratique du Congo (Rdc). La Turquie exprime ainsi sa volonté de se positionner en Afrique comme un partenaire économique. Un forum économique dénommé « Pont de commerce extérieur Turquie Afrique » aura à cet effet lieu du 13 au 18 juin 2010 en Turquie. Il est supposé accueillir 800 hommes d’affaires africains, 1500 hommes d’affaires turcs, 100 ministres et bureaucrates africains, 35 journalistes africains, et environ trois millions de dollars de volume d’affaires traités.
Eclaircissements du Dr Aboya Endong Manassé sur la visite du président turc au Cameroun
Dr Aboya Endong Manassé, journaliste et politologue
Politologue, Chercheur, Directeur exécutif du GREPDA (Groupe de recherches sur le parlementarisme et la démocratie en Afrique) explique les enjeux de la visite du président Turc en terre Camerounaise.
Comment peut-on comprendre la visite du Président turc au Cameroun ?
La visite du Président Abdullah Gül au Cameroun est indicative d’un symbolisme particulièrement cher à la Turquie de ces dernières années, notamment un pays qui travaille sans relâche dans la structuration de l’évolution positive de son image dans le monde précisément dans le domaine de sa politique étrangère.
Selon-vous, que cherche la Turquie au Cameroun ?
C’est clair que la Turquie veut durablement s’installer au Cameroun dans le but de faciliter le déploiement d’une coopération économique entre les deux pays. Mais au-delà de cet enjeu économique évident, la Turquie voudrait aussi contribuer à structurer l’espace politique de la sous-région à partir du Cameroun, par ses moyens, son modèle d’Etat laïque et démocratique et la solidité des liens à la fois avec l’Union européenne et les Etats-Unis d’Amérique. En clair, la Turquie est aussi dans un déploiement d’influence car entre les Etats, il n’y a jamais de coopération neutre.
Qu’est ce que le Cameroun peut tirer de cette coopération ?
Si cela est bien négocié, le Cameroun pourrait obtenir dans la signature des accords et partenariats économiques qui pourraient être bénéfiques à ses investisseurs, avec notamment la possibilité d’ouverture de nouveaux marchés. Mais au-delà de ces aspects, la vie politique qui reste démocratique en Turquie, résultante d’une organisation plurielle de la société d’une part, et le dynamisme économique qui reste un atout de taille pour cette puissance régionale d’autre part peuvent inspirer les Camerounais à se projeter vers ces types de valeurs au moment où la démocratie se contente de l’apaisement. Non sans souligner l’économie qui a du mal à s’émanciper des balbutiements.