Une politique-fiction qui doit bientôt paraître en Turquie évoque avec beaucoup d’humour une invasion des Etats-Unis par de jeunes nationalistes turcs, avec le concours d’extraterrestres, un roman anti-américain qui risque d’être un nouveau succès de librairie après le best-seller « Tempête de métal ».
« L’Amérique est à nous » va être distribué à partir du week-end en Turquie. Sur sa couverture, la statue de la Liberté porte une moustache, symbole machiste turc, et le drapeau américain est frappé de trois croissants, emblème des ultra-nationalistes turcs.
Le sujet du roman est farfelu : excédé par l’interventionnisme américain dans le monde et notamment après que des bateaux de guerre américains eurent franchi secrètement le Bosphore, à Istanbul, un jeune nationaliste turc reçoit lors d’une prière la visite d’un extraterrestre qui exauce son voeu de vouloir s’emparer de la superpuissance américaine grâce à un engin qui contrôle les esprits.
Mais la comédie ne fait que commencer car les occupants turquisent immédiatement le pays en organisant par exemple à la Maison Blanche des fêtes de « cig kofte », une sorte de steak tartare turc.
Le Turc est déclaré langue officielle et Madonna devient danseuse du ventre.
« Les sentiments anti-américains sont à la base de ce roman mais ce n’est pas un livre de guerre, car personne n’est tué », explique à l’AFP l’un des deux auteurs du livre, Erdogan Ekmekci.
Cet ancien agent commercial de 27 ans qui vit à Istanbul en est à son premier roman. Il ne cache pas que la « conjoncture » est très proprice à la publication de pamphlets anti-américains, mais déclare que son livre est en fait une « auto-critique » des Turcs et de leur mode de vie.
« La Turquie est mal dirigée par les Turcs qui dirigeront mal les Etats-Unis ce qui provoquera la fin de ce pays car nous y exportons nos problèmes et nos malheurs », dit-il.
Exemples des problèmes sociaux —de longues queues devant les hôpitaux— et une économie fragilisée par une mauvaise gestion où le pain se vend à 250 dollars.
« Nous avons pêché et blâmé le diable », ajoute le co-auteur du roman qui sera publié dans la foulée d’un autre livre, plus sérieux, qui relate une invasion de la Turquie par les Etats-Unis en 2007.
« Tempête de métal » est devenu un best-seller avec plus de 110.000 exemplaires vendus.
Le roman a surtout le vent en poupe en raison des vifs sentiments anti-américains en Turquie depuis l’occupation de l’Irak en 2003 qui a provoqué de réelles tensions entre Ankara et Washington, alliés au sein de l’Otan.
L’anti-américanisme fait vendre ces temps-ci en Turquie et les éditions Akis envisagent de tirer à au moins 50.000 exemplaires cette deuxième fiction impliquant les Américains.
« Le milieu est propice », explique Adem Ozbay, un responsable de la maison d’édition.
Il regrette qu’un outrage au drapeau par des adolescents kurdes lors d’une fête kurde ait entrainé un mouvement de chauvinisme et de patriotisme.
« Nous avons voulu nous amuser et imaginer ce qui se produirait aux Etats-Unis si les erreurs commises ici se répétaient là bas, c’est du tragi-comique », dit l’éditeur.
A la fin du livre, les choses se gâtent et le héros principal est obligé de recourir au service d’extraterrestres pour revenir dans le temps, comme si rien ne s’était passé.