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L’UE ne lie pas les négociations d’adhésion de la Turquie à la reconnaissance du génocide

dimanche 24 avril 2005, par Thomas Ferenczi

Le Monde

La Fédération euro-arménienne pour la justice et la démocratie vient de lancer, à Bruxelles, un appel à l’Union européenne pour qu’elle inclue la reconnaissance du génocide arménien dans ses futures négociations avec la Turquie. « Accepter la négation du génocide par ce pays, c’est mettre en danger les valeurs de justice et de paix, fondatrices de l’Europe », affirme-t-elle. Elle souligne que neuf Etats de l’Union ­ la Belgique, Chypre, la France, la Grèce, l’Italie, les Pays-Bas, la Pologne, la Slovaquie, la Suède ­ demandent désormais à la Turquie de reconnaître le génocide. En Allemagne, un débat s’est ouvert, jeudi 21 avril, au Bundestag, à l’initiative de l’opposition conservatrice.

Ni la Commission européenne, dans sa recommandation du 6 octobre 2004 en faveur de l’ouverture de négociations, ni le Conseil européen, dans sa décision positive du 17 décembre, n’ont subordonné leur avis à la reconnaissance du génocide arménien. Ces deux institutions ont jugé que la question ne relevait pas des critères de Copenhague, qui imposent aux candidats le respect des principes de la démocratie, des droits de l’homme et de l’économie de marché, mais pas d’une démarche historique.

L’étude d’impact conduite par la Commission indique qu’« en ce qui concerne les événements tragiques, notamment la souffrance humaine, qui se sont produits dans la région en 1915-1916, la perspective de l’adhésion de la Turquie doit conduire à une amélioration des relations bilatérales avec l’Arménie et à la réconciliation à propos de ces événements ».

La Turquie est invitée à établir des relations diplomatiques avec l’Arménie et à ouvrir sa frontière. Le Conseil européen a souligné en décembre « la nécessité d’un engagement sans équivoque en faveur de relations de bon voisinage ». Dans l’entourage du commissaire à l’élargissement, le Finlandais Olli Rehn, on estime que l’ouverture de la frontière créera « les conditions d’une réconciliation durable » et que les négociations aideront à faire naître un meilleur climat, qui rendra possible un dialogue plus confiant.

La résolution adoptée le 15 décembre à une large majorité par le Parlement européen, sur le rapport du Néerlandais Camiel Eurlings (PPE), ne lie pas l’ouverture des négociations à la reconnaissance du génocide, mais elle s’y réfère explicitement en mentionnant, parmi les « pas en avant essentiels » constatés dans les relations entre l’Arménie et la Turquie, « le remarquable travail des historiens turcs sur le génocide » et la renaissance des rapports d’Etat à Etat. Il reste nécessaire, ajoute le texte, d’« aller jusqu’au bout de cette démarche ». Le Parlement européen estime, dans sa résolution, que « les gouvernements turc et arménien doivent poursuivre leur processus de réconciliation, éventuellement avec l’assistance d’un comité d’experts indépendants, afin de surmonter de manière explicite les expériences tragiques du passé ».

Au cours du débat, le génocide arménien a été plusieurs fois évoqué. Parmi les adversaires de l’adhésion, le Français Bernard Lehideux (UDF) a estimé qu’« il n’est pas pensable d’engager les négociations avec la Turquie tant qu’elle n’aura rien dit sur le génocide arménien ». Le souverainiste Paul-Marie Coûteaux a reproché à la Turquie son « arrogance ». « Pourquoi, a-t-il dit, refuser avec tant d’obstination de reconnaître l’épouvantable génocide arménien ? » Le Britannique James Hugh Allister, élu unioniste d’Irlande du Nord, a déclaré, pour justifier son opposition, que la Turquie « cache une honteuse histoire d’expansionnisme ».

Partisan de l’ouverture des négociations, le Chypriote Ioannis Kasouliodes (PPE) a affirmé : « L’Union européenne doit exiger de la Turquie qu’elle reconnaisse le génocide arménien. » Le socialiste français Michel Rocard a appelé à une réconciliation « à partir d’une réalité historique établie », tout en regrettant que « le rappel insistant et souvent répété des événements de l’histoire turque récente » réponde trop souvent à « une inspiration méfiante et hostile ».

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