AFP - Un journaliste turc de premier plan vient de publier un livre qualifiant de génocide les massacres d’Arméniens survenus en 1915-17 dans l’empire ottoman, une prise de position rare en Turquie où le terme est récusé par les autorités et reste encore largement tabou.
- Hasan Cemal vient de publier un livre qualifiant de génocide les massacres d’Arméniens survenus en 1915-17 dans l’empire ottoman
- une prise de position rare en Turquie où le terme est récusé par les autorités et reste encore largement tabou.
Editorialiste du quotidien Milliyet, Hasan Cemal, qui est aussi le petit-fils de Cemal Pacha, un des généraux à la tête de l’empire ottoman lors de la Première guerre mondiale, relate dans « 1915 : Le Génocide Arménien », sorti mercredi en librairie, son cheminement intellectuel et émotionnel vers la reconnaissance du génocide.
« Je comprends votre douleur face au génocide, je la partage » : c’est par ces mots, prononcés en mars 2011 lors d’une conférence à Los Angeles devant une audience largement composée de membres de la diaspora arménienne, que l’auteur affirme être passé de l’autre côté du miroir.
Des mots prononcés avec difficulté, au terme d’un long parcours amenant Hasan Cemal, dont le grand-père a été assassiné en 1922 à Tbilissi par un activiste arménien, à prendre progressivement ses distances avec les thèses officielles.
« La douleur de 1915 n’appartient pas au passé, mais bel et bien au présent. C’est en faisant la paix avec l’histoire —la vraie, pas celle qui comme chez nous a été réinventée ou altérée— et en nous sauvant du virus de l’exploitation de l’histoire que nous pourrons trouver le repos », souligne le journaliste.
La Turquie reconnaît des massacres d’Arméniens en 1915-1917 —elle parle de 500.000 tués— dans les territoires administrés par l’empire ottoman, dont elle est l’héritière, mais récuse le terme de génocide. Les Arméniens avancent le chiffre de 1,5 million de morts dans un génocide, reconnu par de nombreux pays.
La vision officielle turque est contestée depuis la fin des années 1990 en Turquie par certains historiens et la tenue en 2005 d’une conférence universitaire sur la question arménienne a marqué une relative libération du débat. Mais l’emploi du mot génocide par des personnalités demeure très rare.
Le prix Nobel de littérature 2006, le Turc Orhan Pamuk, a été poursuivi en 2005 et a reçu des menaces de mort après avoir affirmé dans un journal suisse qu’« un million d’Arméniens et 30.000 Kurdes ont été tués sur ces terres ».